L’AFFAIRE
Le
1er Novembre 1897, jour de la Toussaint, éclata à Coustaussa petit
village de l’Aude, situé à quelques kilomètres de Rennes-le-Château,
la nouvelle d’un crime abominable perpétré sur la personne de l’abbé
Gélis, curé du village.
Le
corps fut découvert le jour même, par son neveu inquiet de ne pas
l’avoir vu :
« Il entra dans la cuisine, appelant de
nouveau, lorsque trébuchant sur une masse informe, il faillit tomber ;
regardant alors à ses pieds, à la lueur qui filtrait à travers les
volets clos de la cuisine, il vit et reconnut son oncle couché sans
vie dans une mare de sang. Affolé à cette vue, il est sorti dans la
rue où il faillit s’évanouir. »
Devant
l’horreur du crime, des mesures furent prises immédiatement :
« Le maire fit immédiatement fermer les portes
du presbytère et envoya un express à Couiza avec mission de prévenir la
justice et la gendarmerie. Egalement prévenu, Monsieur Pugens, juge de
paix à Couiza, se transporta immédiatement
sur les lieux du crime où, en attendant l’arrivée du parquet de
Limoux, il procéda à l’apposition
des scellés. »
Il
semblerait que la victime se soit défendue :
« Couché dans une mare de sang, la soutane
lugubrement souillée, la victime a
les mains ramenées sur la poitrine et l’une des jambes repliée est
ramenée en dedans... La lutte a dû
être terrible et les coups violents à en juger les blessures
nombreuses que porte la victime. Des taches de sang se voient sur les
meubles, sur les murs et sur le plafond lui-même. »
Le
meurtrier qui s’est acharné, a cherché et réussi à tuer :
« Sur une table provisoirement installée dans
la cuisine à l’aide de planches posées sur deux chevalets, le corps de
la victime est placé et le docteur Benoît procède à l’autopsie.
L’abbé Gélis, frappé par son meurtrier avec une violence et un
acharnement inouïs, ne porte pas moins de
quatorze* blessures horribles à la tête, un peu au-dessus de la
nuque ; en plusieurs endroits le crâne est fracturé et le cerveau mis à
nu. Trois* blessures de moindre
importance s’étalent sur la face blême du cadavre. »
Les
autorités utilisent les grands moyens pour surprendre un assassin inconnu
:
Selon « le courrier de l’Aude »
cité par Patrick Ferté :
« Toutes les brigades de gendarmerie sont sur
pied ; elles ont reçu l’ordre de veiller sur les routes et dans les
campagnes. Les gendarmes de
Perpignan cernent la frontière ; ceux de Limoux, de Couiza et des
environs redoublent de zèle et de vigilance. »
L’assassin
a fouillé la maison, mais pas pour voler :
« Le vol
ne paraît pas avoir été le mobile du crime. Des tiroirs
entr’ouverts contenaient encore des écus et même en monnaie environ 1
500 Francs. Cependant l’assassin a dû fouiller, mais pour d’autres
motifs que l’enquête établira sans doute. »
* Noter
« 14 et 3 » ou 3,14 (p),
secret de l’angle de 17°
caché sur le Gnomon de l’église St Sulpice...
Le
journal confirmait le lendemain :
« Les tiroirs étaient ouverts, on avait fouillé dans tous les meubles ! Pourquoi si ce n’est pas
pour voler de l’argent, des actions ou des valeurs quelconques ?
L’assassin, qui a si minutieusement fureté partout, n’avait-il pas
par hasard intérêt à faire disparaître un papier, une lettre de
change, la reconnaissance d’une dette ? C’est une simple supposition
d’entre les nombreuses qui courent la rue et que nous rapportons sans y
attacher plus d’importance. »
L’abbé
Gélis aurait dû se croire à l’abri car le journal remarquait :
« Le presbytère est situé au coeur du village
et se trouve entouré de maisons bien rapprochées. »
Il
apparut que la victime prenait des précautions, comme si elle se sentait
menacée :
« On sait que l’abbé Gélis vivait seul,
enfermé à clef dans son presbytère et qu’il
n’ouvrait sa porte qu’à une voix connue de lui. »
« Incontestablement méfiant...
il dort toute l’année les volets
clos, ce qui étonne, surtout l’été, et a fait poser sur la porte
d’entrée du presbytère une clochette
pour signaler tout éventuel visiteur. »
Patrick
Ferté commente :
« Mais de quoi avait-il donc peur dans son
presbytère barricadé, n’ouvrant qu’après mot de passe ?
Quel document cachait-il dans ses tiroirs, plus précieusement que son
argent et ses chandeliers ? »
Le 9
novembre :
« Le bruit de l’arrestation de l’assassin
persiste à courir dans notre ville. D’après nos renseignements
personnels, nous pouvons affirmer qu’aucune arrestation n’a encore été
opérée... tout ce que nous pouvons dire, c’est que la
justice a des soupçons et qu’elle mène
activement mais secrètement son enquête. »
La
découverte d’un document codé fut le tournant de l’enquête :
Le 21 novembre, revenant sur cette affaire,
le courrier de l’Aude précise :
« Un
document précieux pour cette affaire vient d’être envoyé à Paris
pour être soumis à une expertise. »
Si le document fut « envoyé à
Paris », ce fut pour limiter au maximum le nombre de personnes
susceptibles d’en avoir connaissance ; en effet, il contenait le codage
du Grand Secret...
Et
Patrick Ferté d’ajouter :
« Ce qui est sûr et troublant, c’est que dès cet envoi, IL NE FUT PLUS JAMAIS QUESTION de l’enquête sur le
crime de Coustaussa. »
En effet, les autorités connaissant le
mobile du crime en déduisirent l’identité du (ou des) meurtrier.
Et
de conclure :
« - Le courrier de l’Aude - s’était posé
dès le début cette question : Dieu
seul connaît le coupable. Mais Dieu permettra-t-il que ce coupable reste
impuni ?
Apparemment Dieu a permis ; en tout cas, en coulisses, ON semble avoir
fait en sorte d’obtenir Sa permission. »
AFFAIRE D’ETAT
OU AFFAIRE
D’ETR’ETAT ?...
COMPLEMENT D’ENQUETE :
Selon
deux avocats, Maîtres J. Coudy et M. Nogué qui ont fait une enquête en
1975 :
« L’abbé Gélis a ouvert tard. A qui a-t-il
ouvert ? Et pourquoi a-t-il pris la précaution soulignée par les procès-verbaux
de relever au moyen de la ficelle ad hoc, la clochette d’alarme qui ne
tinta pas, cette nuit-là ? »
Patrick
Ferté ajoute :
« Certains ont suggéré que l’assassin
venait emprunter de l’argent au curé ou bien encore qu’il venait récupérer
une promesse de dette : cela ne tient pas. Car le
mystérieux visiteur ne fut pas reçu comme un obligé, un débiteur
soumis, mais au contraire comme un
« maître » puisqu’il fume devant l’abbé qui détestait
notoirement le tabac, puisqu’il boit, comme en témoignent l’odeur de
tabac, le papier à cigarettes Tzar et deux
bouteilles entamées de banyuls et de porto. »
La
comptabilité du curé Gélis qui percevait 900 Francs par an, a été
analysée par le juge d’instruction :
« Ce n’était pas le Pérou... il
vivait avec 700 Francs dépensés dans l’année. Outre son
traitement, l’abbé Gélis touchait quelques fermages. Rien
d’important. »
A la
surprise générale, il se révéla que la victime disposait de sommes
importantes :
L’enquête révéla (Cf. P.Ferté p.93)
que le curé doyen de Trèbes se voyait confier depuis trois ans, 1 000
Francs par an par l’abbé Gélis, pour les placer en obligations du
chemin de fer :
« Le
doyen l’a reçu en visite le 24 septembre 1897. A cette occasion, Gélis
lui a remis encore 1 200 Francs aux mêmes fins, ajoutant de NE JAMAIS LUI
ECRIRE A CE SUJET. Toujours le secret. »
P.
Ferté précise p.94, que la maison du curé était truffée de trésors
cachés :
« Mais ce ne sont pourtant là que des péccadilles, au regard des découvertes
du juge d’instruction, transporté au presbytère de Coustaussa, le 4
novembre 1897 :
« Le
juge a trouvé un écrit de l’abbé épinglé à une note de dépense
du 24 septembre 1897, rédigé le jour même de sa visite au curé-doyen
de Trèbes. Cet écrit révèle que
l’abbé a caché pour 13 000 Francs (soit
de quoi vivre vingt ans !) de pièces
d’or en divers endroits de sa maison et de la sacristie. » ! Le
document était codé. »
Le
juge inventoria :
« 4 000 F sous un tabernacle, 2 000 F sous un
rochet. Cela pour la sacristie « enfoncée dans la
terre au deuxième sous-sol ». Puis « au presbytère on
découvrit pour 1 000 F de jaunets (pièces d’or) dans le chambranle de
la cheminée de la chambre ; autant dans le prie-Dieu, autant sous une
pierre des lieux d’aisance, autant sous le plancher du grenier ; autant
dans une dépendance, sans parler de diverses sommes dans les livres de la
bibliothèque. Il y en avait partout pour 11 400 F, en napoléons de 20 et
10 F renfermés dans de vieux morceaux de tuyaux de poêle, ou des tubes
en fer blanc. »
Pourquoi
diable l’abbé Gélis aurait-il codé l’emplacement de ses cachettes ?
Seuls, signalent MMes Coudy et Nogué, les 1000 F
signalés dans une cave ne furent pas retrouvés. Sans doute y sont-ils
encore. Avis aux amateurs ». Et de couronner leur intéressant
article de ces questions cruciales : « depuis
quand ce trésor ? Pourquoi ? Comment ? Quel langage dissimulé avait
utilisé le prêtre pour que le juge ne comprenne les lieux signalés des
caches qu’après leur découverte ? ... L’affaire demeurera à
jamais mystérieuse. »
La réponse
est simple : il ne l’a pas fait, le document codé contenant un autre
Secret !
DISCUSSION :
L’assassin aurait attaqué par surprise
l’abbé Gélis, au moyen des pincettes qui servent pour activer un feu
de cheminée, puis devant sa résistance, se serait acharné sur lui pour
l’achever à l’aide d’une hachette...
( = L’erminette = aire mine Alet).
Selon le juge d’instruction Raymond Jean, après avoir accompli un
meurtre sauvage, « violent et bestial », le meurtrier aurait brusquement
changé d’attitude et fait montre selon PV du 2 novembre « d’une présence d’esprit incroyable ».
Le meurtre ayant été commis le 1er novembre est nécessairement
prémédité, car la cabale phonétique précise l’un des secrets (n°
3) caché sur la tombe de l’abbé Boudet. (Eccl.
1.11).
Il fallait que l’abbé Gélis meure un 1er
Novembre...
Gélis* 1er Nov. = Je lis 1.11
Après
avoir remis de l’ordre dans la cuisine, le meurtrier traîna le cadavre
au centre de la pièce et lui ramena les mains sur la poitrine comme un
gisant. Cette attitude pourrait laisser supposer qu’il s’agirait
d’un clerc.
Il signa son forfait à titre d’avertissement
à l’usage des initiés, comptant sur la Presse pour le rapporter :
« Viva
Angelina », qui n’est pas sans rappeler la mystérieuse
« Société angélique »...
Cela
fut écrit sur l’une des feuilles d’un carnet de papier à cigarettes
qu’il avait apporté, et de marque fort peu courante « Tzar** »,
« d’une
main peu habituée à écrire » = griffonnée = griffon
nez...
Patrick
Ferté rapporte p. 103 que selon MMes Coudy et Nogué :
« L’instruction a fait parler au maximum ce - témoin muet -. On a
interrogé tous les débitants du département. Aucun ne vendait,
n’avait jamais vendu, de papier cigarettes démarqué « Le Tzar ».
Il venait d’au-delà du département avec son détenteur. Nos recherches
ne nous ont pas permis de savoir qui
le fabriquait et où ? »
Il faudrait rapprocher le nom de cette marque de papier à cigarettes, de
l’existence d’un compte en banque de l’abbé Saunière, en Hongrie...
Selon
nous, l’abbé Gélis ayant exercé un chantage financier sur ses
confrères Saunière et Boudet, aurait été « exécuté »
pour préserver le secret...
Les sommes d’argent importantes trouvées chez l’abbé Gélis ont
été dédaignées par l’assassin qui les lui avait versées, pour
montrer que l’argent n’était pas le mobile du crime. (Il était
tellement riche...).
* Que les sceptiques comparent avec
la fausse date de décès de l’abbé Jean Vié : Jean Vié, 1er 7bre =
17 janvier...
** Notons avec Patrick Ferté (p.106) que Maurice
Leblanc fait allusion dans son roman « 813 »
que nous avons décrypté dans « PREMIERE
REVELATION » à un assassinat lié à un étui à cigarettes,
contenant du tabac russe et
portant une mystérieuse inscription désignant Alet : « 813 ».